Si cet hypocondriaque de Thierry Ardisson est toujours vivant à la rentrée 2015-2016 (on ne s’inquiète pas pour lui, vu qu’il rend malade son entourage à sa place), lui qui a besoin d’un sparring-partner, ce n’est pas Marc-Olivier Fogiel qu’il agressera – ils ont fait la paix sur un divan – mais Yann Barthès, le petit requin qui monte.
- Thierry, cœur en or et portefeuille d’artichaut
Thierry Ardisson, c’est le vieil obsédé qui a été écarté de France Télévisions, perdant la juteuse tranche Tout le monde en parle du samedi soir au profit de Ruquier. Il ne s’en est pas remis. Il gagnait alors 20 000 € par mois de salaire sur France 2, sans compter sa part producteur à travers sa société Ardisson & Lumières, qu’on estime à 20 % du budget de l’émission, soit environ 30 000 € par semaine. Son comparse et sniper Laurent Baffie, désormais atteint de bienpensance sénile, touchait lui 4 000 € par émission. Le revenus réels d’Ardisson étaient donc, au début des années 2000, de 20 000 + 120 000 + 20 000 (sur Paris Première pour la quotidienne Rive droite rive gauche), un total de 160 000 € par mois, sans compter les petites productions annexes. Aujourd’hui, rien qu’avec avec Salut les Terriens, il gagne 184 000 € chaque mois : 40 000 € en tant qu’animateur et 144 000 € en tant que producteur (4 x 36 000, ou 20 % de 180 000 €, le budget de l’émission). Sauf que d’un point de vue comptable, on ne peut ajouter un salaire (d’animateur) et une part producteur.
Rappelons que Thierry, à travers la société de production Téléparis, gérée par son petit associé Stéphane Simon, coproduit des émissions cheap, sur lesquelles il touche son pourcentage. Mais rien de comparable avec sa période fastueuse sur France Télévisions, quand il bénéficiait de mensuelles spéciales… qui n’ont jamais vraiment marché. À son grand dam, Ardisson n’est pas Drucker. Depuis 2005, Thierry s’est lancé dans la production cinéma, qui ne lui a encore pas rapporté grand-chose. Résultat, deux films en dix ans : sa comédie Max a fait 500 000 entrées, sans buzz ni vagues. Un film considéré comme « cucul » par la critique. On ne se refait pas.
- Un talent flou
Heureusement, en 2014, il produit Les Souvenirs, réalisé par Jean-Paul Rouve, et adapté d’un roman de David Foenkinos, auteur d’une médiocrité abyssale, qui obtiendra le Renaudot en 2014 avec un autre livre, Charlotte, l’histoire d’une jeune peintre juive déportée à Auschwitz. Sacré Thierry, on dirait qu’il essaye de racheter quelque chose, mais quoi ?
En réalité, trois gros morceaux ont fait la télé de ces deux dernières décennies, les 3D, dont l’un a tragiquement disparu : Drucker, Delarue, et Denisot. Drucker est toujours fidèle au poste, mais du bon côté. Il avoue chastement gagner 38 000 € par mois sur le service public pour présenter son émission digestive Vivement dimanche, mais en réalité, empoche en moyenne 1 million d’euros par mois à travers sa société DMD. À l’image de Delarue, qui déclarait ne gagner « que » 40 000 € par mois, alors que sa holding pouvait lui rapporter 1,2 million mensuellement, grâce à une majorité de parts. Denisot, lui, est plus discret : il n’annonce rien. Mais a gagné énormément.
- La greffe d’Hanouna sur Dieudonné
a du mal à prendre
La sous-évaluation est la maladie chronique des animateurs… qui culpabilisent toujours un peu, par rapport au salaire moyen du téléspectateur (1 730 € net). C’est pourquoi Cyril Hanouna a cru bon annoncer qu’il ne gagnait « que » 25 000 € par mois pour présenter Touche pas à mon poste. Ce qui est faux. Sa société de production H2O facture à la chaîne D8 chaque quotidienne 40 000 €, sur laquelle l’animateur prélève 4 000 €, en plus de son salaire. Soit déjà 105 000 € (25 000 + 80 000), sans compter les autres émissions produites, comme Enora le soir sur Virgin Radio (dont le slogan est « Foutez-vous de tout »), et ses propres droits d’auteur. N’oublions pas ses 30 000 € mensuels sur Europe1, pour Les Pieds dans le plat, à la place de Ruquier l’après-midi. Cyril à la radio, c’est plus dur : sa case a perdu 367 000 auditeurs en un an, et il est même battu par la bienpensante Charline sur France Inter au même moment. Si le passage radio vers télé fonctionne, le passage inverse télé vers radio semble moins évident.
Mais revenons à Denisot. Son Grand Journal, qu’il présentera pendant 9 ans de 2004 à 2013, lui aura assuré d’énormes rentrées, en tant qu’animateur (7 500 € par émission, sans oublier le contrat d’exclusivité de Canal+, qui peut doubler la somme, comme pour Stéphane Guillon quand il officiait sur Salut les Terriens), plus sa part avec Renaud Le Van Kim, son coproducteur, sur les 180 000 à 200 000 € l’unité quotidienne (selon que l’on compte les « best of » ou pas). Même à 10 % de marge seulement (Delarue montait à 40 %), cela fait un bonus de 10 000 € par jour. Les gains de Denisot se situaient donc entre 350 000 et 400 000 € par mois. Sans oublier les à-côtés, et il en pleuvait : voyages et costumes gratuits, cadeaux chics, invitations universelles. Un animateur, comme un président de la République, ne sort jamais un centime de sa poche.
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À côté de ça, il y a le petit prolétariat de la télé, qui divulgue en général son salaire, car il quitte la stratosphère pour se rapprocher de la norme. Ainsi, Alessandra Sublet, malgré son carton d’audience, relativement à France 5, ne touchait pas plus de 18 000 € par mois (contre 12 000 au début) avant d’être remplacée par Anne-Sophie Lapix. Qui elle, quittera Dimanche+ sur Canal+ et son gros salaire (dans les 40 000), pour une émission plus à son goût, moins politique, plus divertissante.
Pierre Ménès confesse lui-même plus de 20 000 € net par mois, à partir de 40 000 € brut. Mais il a une société dans laquelle il est consultant, ce qui brouille les pistes. Il diversifie sa palette en faisant des clips, et en participant à des débats. Pour avoir une idée du salaire de Mathoux, imaginez que pour commenter la Ligue des Champions, Aimé Jacquet prenait 60 000 € par mois à Canal. Christophe Dugarry, anciennement titulaire d’un compte HSBC en Suisse, gagnait 350 000 € par an comme consultant : commentaires de matches pour le Canal Football Club. En 2012 il signe un nouveau contrat de quatre ans, on peut légitimement penser qu’il approche les 400 000 € par an. Mais on le voit moins…
Le département Foot de Canal+ déborde de fric. Seule différence avec les animateurs classiques : les animateurs foot ne produisent pas, c’est la chaîne qui s’en charge, et reste propriétaire des images. Ils ne vivent donc que sur leur seul salaire, forcément conséquent.
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Il faut donc se méfier des animateurs transparents qui « avouent » leur salaire : en général ils le minorent gravement. Mieux vaut ne rien dire, à la Denisot. Car il y a toujours une prime, un bonus, une clause, des droits cachés. Ainsi, Antoine de Caunes pourrait avoir négocié la production future de plusieurs films avec Canal+ comme avenant à son contrat, lui qui ne trouvait plus trop d’argent pour financer ses longs métrages, avant de revenir au bercail, dans la maison qui l’a fait roi. Ali Baddou, le donneur de leçons littéraires, touchait 40 000 € brut jusqu’en 2011 au Grand Journal pour sa rubrique « culturelle » quotidienne. À la tête de La Nouvelle Édition, qui propose entre 12h20 et 14h les visages familiers des clowns Wizman et Domenach, Baddou toucherait plus de 5 000 € par jour (100 000 € par mois).
Les gros chroniqueurs se situent entre les animateurs et les petits chroniqueurs. Exemple, Jean-Michel Aphatie. La société de production KM le rémunère 400 000 € par an (2 000 € à 2 500 € par émission), soit 40 à 50 000 € par mois. Loin de Denisot avant qu’il ne soit remplacé par de Caunes. Heureusement, son job de directeur de l’info sur RTL lui assure 250 000 € par an. Mais c’est toujours mieux qu’Ariane Massenet, qui commence à 25 000 € mensuels au Grand Journal, avant de passer à 40 000. Juste pour incarner la téléspectatrice un peu sotte en plateau. Depuis, après avoir présenté Est-ce que ça marche ? sur D8, émission co-animée avec le pathétique Camille Combal (prêt à tout pour exister en télé : il a plagié sa chronique sur un talk-show américain), et produite par Hanouna, elle a disparu des radars.
Un qui grossit de plus en plus sur les radars, c’est le petit Yann Barthès. Avant de prendre son envol en indépendant en 2011 avec son coproducteur et ami Laurent Bon, le trublion anti-FN gagnait 30 000 € par mois chez KM pour ses 5 minutes quotidiennes de Petit Journal. Un salaire qui a explosé, depuis que sa société Bangoumi facture directement à Canal+ : de 30 000 € l’émission en 2011, il se paye désormais sur les 75 000 € (voir calcul) que la chaîne verse chaque jour à Bangoumi. En vérité, un pack de 15 à 20 millions d’euros annuels : 200 émissions par an (en comptant les « best of » et spéciales), ça fait bien 75 000 € l’unité, pour 30 minutes de divertissement, cinq jours sur sept, rassemblant 1,75 à 2 millions de téléspectateurs. Concurrençant dangereusement Le Grand Journal, déjà régulièrement dépassé par la dynamique Touche pas à mon poste de la petite soeur de Canal+, D8. À terme, la case du Grand Journal sera récupérée par Yann Barthès et Laurent Bon. À Yann le gros salaire micheldionysien ! Et à nous les grosses leçons de bienpensance antifasciste.
Les petits chroniqueurs balancent plus facilement leur rémunération. Mathieu Madénian, le sniper anti-FN de Drucker, touche 1 500 € par Vivement dimanche, ce qui n’est pas énorme, mais l’impact de l’émission est inestimable : avant lui, elle a permis à Anne Roumanoff de bourrer les salles. Patrick Cohen, l’employé du service public audiovisuel fier de sa liste noire d’invités qui ont le malheur de ne pas penser comme lui, touche 11 000 € par mois pour sa matinale, sur France Inter, plus 6 000 € de pige sur C à vous de France 5, émission pour laquelle il interviewe l’invité et fait bénéficier le téléspectateur de son expertise politique. C’est moins que Bruce Toussaint, qui était payé 30 000 € par mois (sur 10 mois) à Europe 1 jusqu’à l’été 2013. Limogé de partout pour manque de travail et de résultats, il échoue à nouveau sur i>Télé, à la matinale. Autant dire, le goulag.
Hormis les techniciens, ceux qui touchent le moins à la télé, en définitive, ce sont les journalistes : Pujadas ne touche pas plus de 20 000 € par mois (18 000 officiellement), et Elise Lucet dans les 10 000. Un journaliste du Grand journal touche, lui, 3 000 € mensuels.
- Conclusion : pour devenir riche à la télé, n’informez pas, divertissez
Méthode de calcul
Nos chiffres sont des estimations, basées sur des chiffres évolutifs, une bonne connaissance du niveau des prods et des chaînes (merci aux informateurs), et quelques jonglages réalistes. Chez Bangoumi et ses 100 employés, il est interdit de communiquer sur le budget et les salaires du Petit Journal (LPJ).
Voici la méthode qui nous a amené à la fourchette de 65-75 000 € par émission. Canal+ a signé 230 unités/an (365 – 52 week-ends – 31 jours d’août), car LPJ continue en juillet, mélange de spéciales vacances et de « best of ». Sachant que Bangoumi a touché entre 15 et 20 millions d’euros (chiffres du magazine Capital), on obtient donc une fourchette de budget à l’unité de 65 000 €, estimation basse, à 85 000 €, estimation haute. Soit une moyenne de 75 000€.
Second calcul, partant du chiffre réel datant de 2011 d’un Petit Journal facturé 30 000 € par Bangoumi à Canal+ pour 15 mn d’émission. Sachant qu’aujourd’hui LPJ bénéficie de 30-35 mn d’antenne, on a donc un multiplicateur temps de 2,5 environ. Il suffit alors de multiplier le budget 2011 par 2,5 pour obtenir une estimation du budget 2015 et on obtient… 75 000 € (30 000 x 2,5).
De l’autre côté Le Grand Journal (LGJ), qui durait en 2011 (avant la scission du Petit Journal) de 19h10 à 20h50, soit 1h40 amputée des 10 mn de Guignols et de pub, était facturé par la société KM 200 000 € par jour, et 400 000 € pendant Cannes. Pour 200 émissions par an, soit une enveloppe de 40 millions d’euros par an (en excluant Cannes et les « best of »). Avec 15 mn en moins sur 100 mn, soit un diviseur de 15 % (0,15), son budget perd logiquement 15 % de 200 000, soit… 30 000 €. On est donc sur de bonnes masses.
On retire toujours 10 mn de Guignols qui sont produits en interne, pour une enveloppe de 15 millions d’euros par an. Aujourd’hui que LPJ dure 30 mn, grignotées sur LGJ, si l’on considère que le budget total LGJ+LPJ avoisine toujours les 200 000, LGJ n’a plus qu’un budget de 70 % de celui de départ (30 mn de perdues sur 100), soit 140 000 €, ou 34 millions par an en incluant les gros budgets pour Cannes (enveloppe de 6 millions ou 15 x 400 000 € pour le Festival).
Le chiffre du journal Le Monde qui tourne depuis trois ans sur le Net d’un budget du Grand Journal de 120 000 € en 2011 est donc erroné. Sachant en outre que la version Merci pour l’info d’Emmanuel Chain et sa société Elephant (2003-2004 avant LGJ) prenait déjà ce tarif à Canal+ en 2003 !
- Juste avant son changement de sexe, Yann pose ici à côté de Michel
Si pour certains le budget du Petit Journal peut paraître important (plus de 17 millions d’euros par an), sachez qu’une société qui produit le programme le plus en pointe en termes de notoriété et de reprise, avec des tunnels publicitaires grandissants (ça ne trompe pas), qui s’adresse aux jeunes et aux branchés (bon pour l’image et l’annonceur), est à la fois rentable pour elle-même et pour le diffuseur. De plus, par rapport à un Grand Journal statique, composé de personnalités qui ne fonctionnent pas ensemble, et mû par un animateur trop lisse avec les invités (mais qui gronde ses subordonnés), et les tunnels de pubs qui rapetissent (le premier tunnel à 30 000 € a disparu), Le Petit Journal, avec son travail journalistique poussé, même s’il est orienté, ses sketches quotidiens, ses reportages dans le monde entier (les petits JRI vont sur les théâtres de guerre !), ses bimbos et ses interviews people décalées, c’est de la bombe atomique télévisuelle. Assurément le programme télé le plus moderne, le plus vivant, le plus agressif.
Vous voyez, si on dénonce l’idéologie faussement subversive de ce programme, on peut en apprécier le professionnalisme. Il ne reste qu’à faire la même chose en mode vraiment subversif !